Pour bien comprendre ce poème, il me faut vous remettre en mémoire l’histoire d’Hamlet, célèbre pièce de William Shakespeare, dont Ophélie est un des personnages.

Chers Amis,

OPHELIE : Un des plus beaux poèmes de Rimbaud.

Qui est est-il ? Je ne vous en dirai pas grand chose aujourd’hui, car j’y reviendrai plus tard, par le biais d’une autre poésie…

Arthur Rimbaud est né à Charleville en 1854, voyageur infatiguable, il meurt à Marseille en 1891, d’un cancer généralisé, quelques mois après l’amputation de sa jambe droite.

(« to be or not to be… »).

SHAKESPEARE ? William Shakespeare  (Stratford-on-Avon 1564-1616) dramaturge anglais, ses pièces de théâtres étonnent par leur  maîtrise dramatique.

On peut diviser son oeuvre en 3 périodes : la première marquée, par la jeunesse du poète :  La Mégère Apprivoisée, Roméo et Juliette, le Marchand de Venise etc….

La deuxième,  par la déception politique et la tragédie de la vie : Othello, Macbeth, Hamlet……

et la troisième, par plus de philosophie, de  calme  :  Conte d’hiver, la Tempête etc…..

mais je suis certaine que la plupart  de ces titres vous parlent.  

Hamlet : petit rappel  pour mieux apprécier  la splendeur de ce poème.

Polonius, roi du Danemark, meurt assassiné par son frère Claudius, qui évidemment lui succède et qui pour couronner le tout, épouse Gertrude,  sa veuve.

Le spectre de Polonius apparaît alors à son fils Hamlet,  et crie vengeance. Hamlet est incapable d’agir et devant l’étrangeté de ses réactions, son entourage se demande dans quelle mesure il a conservé la raison. On met cette attitude sur le compte de la mort de son père, et de l’amour qu’il porte à Ophélie, fille de Polonius,  chambellan et conseiller du roi.

Au travers, d’une  tenture, Hamlet  croit  tuer Claudius, son oncle et venger ainsi son père. Grossière erreur, il s’agissait du  père d’Ophélie.

Plus tard, Hamlet est tué à son tour. Témoin de trop de drames, Ophélie devient folle et est retrouvée noyée dans un ruisseau. Eh oui ! on s’amuse comme on peut !

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Ophélie – Peinture d’Alexandre Cabanel – 1883 –

I.

Sur l’onde calme et noire où dorment les étoiles

La blanche Ophélia flotte comme un grand lys,

Flotte très lentement, couchée en ses longs voiles…

On entend dans les bois lointains des hallalis.*

Voici plus de mille ans que la triste Ophélie

Passe, fantôme blanc, sur le long fleuve noir

Voici plus de mille ans que sa douce folie

Murmure sa romance à la brise du soir.

Le vent baise ses seins et  déploie en corolle

Ses grands voiles bercés mollement par les eaux.

Les saules frissonnant pleurent sur son épaule,

Sur son grand front rêveur s’inclinent les roseaux.

Les nénuphars froissés soupirent autour d’elle;

Elle éveille parfois un aune* qui dort,

Quelque nid, d’où s’échappe un petit frisson d’aile :

Un chant mystérieux tombe des astres d’or.  

II.

O pâle Ophélia ! belle comme la neige!

Oui, tu mourus, enfant, par un fleuve emporté !

C’est que les vents tombant des grands monts de Norvège

T’avaient parlé tout bas de l’âpre liberté;

C’est qu’un souffle tordant ta grande chevelure,

A ton esprit rêveur portait d’étranges bruits,

Que ton coeur écoutait le chant de la Nature

Dans les plaintes de l’arbre et les soupirs des nuits;

C’est que la voix des mers folles, immense râle,

Brisait ton sein d’enfant, trop humain et trop doux;

C’est qu’un matin d’avril, un beau cavalier pâle,

Un pauvre fou, s’assit muet à tes  genoux !

Ciel ! Amour ! Liberté ! Quel rêve, ô pauvre folle !

Tu te fondais à lui comme une neige au feu :

Tes grandes visions étranglaient ta parole

Et l’Infini terrible éffara ton oeil bleu !

III.

Et le Poète dit qu’aux rayons des étoiles

Tu viens chercher, la nuit, les fleurs que tu cueillis;

Et qu’il a vu sur l’eau, couchée en ses longs voiles,

La blanche Ophélia flotter, comme un grand lys.

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  Peinture de John Evereet  Millais – La mort d’Ophélie – 1852.

Petit lexique :

Hallalis : cri des chasseurs « taille-hors », ou sonnerie de trompe annonçant que le cert est aux abois.

Aune ou aulne : arbre poussant sur des sols humides.

Ce poème en dit long sur Rimbaud, sur son amour de la liberté, et de la nature.

A lire et à relire,  tout bas,  tout haut, tout seul ou accompagné, sans aucune retenue !

Soyez gourmand, régalez-vous ! 

Par Vivianne pour  La mort fait partie de la vie.